JAMIE ELLIN FORBES,HISTORIENNE & EXPERT EN ART, RÉDACTRICE EN CHEF, DU FINE ART MAGAZINE,NEW YORK – USA
Q. Quand vous parlez de l’équilibre des couleurs, vous faites référence à un tableau comme celui-ci ? R. Oui. Cette toile a une telle force évocatrice. Vous êtes invité à entrer dans son univers, par exemple, à goûter cette orange, à faire partie de ce moment que décrit l’artiste. Ce n’est pas un instantané. Vous êtes invité à vous inscrire dans le processus créateur de l’artiste. Quelque part, à l’origine, on trouve un déclencheur, une inspiration qui appartiennent à une sorte de mystique, et les couleurs sont au service de cette mystique. Ce tableau possède des lignes définies, mais le plus souvent, celles-ci se fusionnent à travers la couleur. Les formes se concrétisent à travers la couleur. Les lignes et les formes existent toujours, mais la composition devient libre et fluide. Q. Vous avez écrit à propos de Carson qu’on pouvait le comparer à Kandinsky, Mondrian, Picasso, Van Gogh, Pollock, mais pourquoi Carson ? R. Parce qu’il possède cette incroyable clarté dans la couleur. Et puis, ce n’est pas tout de peindre! Vous ne pouvez extrapoler si vous ne maîtrisez pas la forme. Pour extrapoler, vous devez maîtriser la forme, savoir peindre ! |
R. Oui, ça m’a inspirée. J’ai su qu’il y avait matière à écrire, qu’il y avait là matière à développement. C’est une affaire de correspondance, de synergie, s’il n’y a pas d’art, il n’y a pas de rencontre. Si l’art est là, on réussit ensemble à faire quelque chose. On sait qu’on va réussir, l’expression propre de l’artiste est bien là. Alors, on prend le temps de faire des recherches, de réfléchir, d’échanger, de comprendre et puis, on passe à la rédaction au sujet de l’art. J’ai senti que Charles possédait beaucoup d’énergie, de capacité, d’enthousiasme au service de l’art. Tout ce qu’il faut pour porter l’expression artistique à son apogée. En rétrospective, je trouve que la couleur travaille très fortement à concrétiser l’expression propre de l’artiste et que les gens saisissent cette expression aussitôt qu’ils voient les œuvres. Si le spectateur ne peut déceler à première vue de quelle lettre de l’alphabet il s’agit, de quel paysage de rêve il s’agit, vous le perdez. Mais s’il y parvient instantanément, vous avez fait sa conquête. Il faut que cette clarté soit présente. Après 34 ans, je le sais très bien. Q. Après toutes ces années, qu’est-ce qui vous inspire toujours? R. Cela me nourrit. Quand j’ai fini d’écrire cet article en y prenant autant de plaisir, j’étais comblée. Ça me nourrit. Je sens qu’une chose a été accomplie. Pouvez-vous imaginer ce que serait la vie des gens sans l’art? Si M. Carson n’avait pas la liberté de partager son expérience, s.il n’avait pas la possibilité de la partager? Ce serait terrible! |
Q. Vous connaissez cette technique, puisque vous avez écrit qu’il fallait ajouter un « isme » à Carson? R. C’est que Charles fait école. Comme c’était en couverture, je voulais souligner qu’il créait une école. Vous savez, tout est en « isme » : impressionnisme, postimpressionnisme, expressionisme, et ici, nous avons du carsonisme. Il y a dans son œuvre des éléments inédits. Je n’ai pas vu d’autres artistes utiliser cette technique. Et vous; en avez-vous vu? Non. Il est le seul au monde à utiliser cette technique. Je pense aussi qu’il est le seul à faire ceci! Nous avons toutes deux été à des expositions. Nous avons été à la FIAC et à d’autres événements. Q. Oui, son style carsonisme est unique. R. Alors, n’est-ce pas là la base d’un mouvement? Bien sûr, Carson peut faire des emprunts. Mais, quelqu’un a-t-il fait du Braque, du Léger ou du Pollock avant eux? C’est ça le « isme ». Q. Merci beaucoup, Jamie-Ellin. R. Merci à vous. Q. C’était un plaisir. |